Introduction
La cheville joue un rôle essentiel dans la course à pied, en particulier en ce qui concerne son rôle amortissant et sa présence dans le complexe de ressort avec le genou.
La cheville est une articulation très stable dont le rôle principal est la transmission des mouvements et des forces pendant la marche dont elle est le deuxième pivot. Fondamentale dans le maintien de l’équilibre corporel statique et dynamique, elle est extrêmement sollicitée et soumise à des charges très importantes lors de certaines activités physiques (plusieurs fois le poids du corps).
La cheville et le genou travaillent ensemble pour absorber les chocs lors de la course à pied.
La rigidité et la souplesse de ces articulations ont un impact significatif sur la performance et le risque de blessure en course à pied. Voyons ce que dit la littérature à ce sujet.
Range of motion (ROM)
On voit souvent écrit « ROM » dans les études scientifiques : sa définition est « Range Of Motion » et ce n’est autre que l’amplitude de mouvement, autrement dit dans le cas de l’articulation de la cheville le « nombre de degrés d’angle (°) atteint en dorsiflexion ».
C’est donc la différence entre l’angle (°) de dorsiflexion lors de la phase d’amorti au sol et l’angle de dorsiflexion à l’impact.
La phase d’amorti de la cheville
La phase d'amorti en course à pied met en jeu plusieurs muscles de la cheville et du segment jambier pour absorber l'impact et stabiliser le corps.
Cette phase correspond majoritairement à une contraction excentrique des muscles de la loge postérieure et latérale du pied et de la jambe afin de contrôler la dorsiflexion de cheville et le mouvement d’éversion (faussement appelé pronation) et ainsi amortir le choc lors du contact avec le sol.
Voici quelques groupes musculaires et leurs actions majeures :
Gastrocnémien et soléaire (les muscles du mollet) : Ces muscles situés à l'arrière de la jambe aident à fléchir la cheville et à absorber l'impact lors de la descente du talon.
Fibulaires (péroniers) : Les muscles fibulaires, situés sur la face latérale de la jambe, contribuent à la stabilité de la cheville en contrôlant l'inversion et l'éversion.
Muscles extenseurs des orteils : Ces muscles aident à maintenir la stabilité du pied pendant la phase d'amorti en travaillant contre la flexion excessive des orteils.
Muscles fléchisseurs des orteils : Ils contribuent également à la stabilité en contrôlant la flexion des orteils et en aidant à maintenir l'arche du pied.
Il est important de noter que ces muscles travaillent en synergie pour fournir un amorti efficace pendant la course à pied. Un entraînement ciblé pour renforcer ces muscles peut aider à améliorer la performance et à réduire le risque de blessures liées à la course.
Les conséquences d’une dorsiflexion efficace
Selon la littérature scientifique, Un mouvement efficace de dorsiflexion de la cheville permet:
Une contraction maximale des muscles du plancher pelvien plus élevée chez les femmes
Une plus grande activation du quadriceps chez les individus en bonne santé
Une plus grande production de force lors d’un tâche isométrique maximale chez les individus en bonne santé
Une activation transversale accrue de l’abdomen lors des manœuvres de tirage chez les individus en bonne santé
Toujours selon la littérature, une grande amplitude de dorsiflexion de la cheville associée à une augmentation de l’extensibilité du complexe gastrocnémien – soléaire permettent :
Un déplacement du genou dans le plan sagittal plus élevé à l’atterrissage
De plus faibles forces de réaction au sol.
Un taux de charge plus faible
Diminution du risque de rupture des LCA 5 et du tendon rotulien
Quels mécanismes sont mis en jeu lors d'une dorsi-flexion insuffisante ?
Un « ROM » de dorsiflexion de la cheville insuffisant induit une perte de degrés de liberté qui conduit au développement de stratégies de mouvements compensatoires .
Ces stratégies de mouvements compensatoires sont associées à un risque de blessures.
Pour la marche, il est nécessaire d’avoir
10° de « ROM » de dorsiflexion de la cheville pour marcher sur une surface plane, descendre les escaliers ou s’agenouiller.
Un « ROM » insuffisant de dorsiflexion de la cheville peut altérer la biomécanique des membres inférieurs en réduisant la stabilité médio-latérale de la cheville.
Les études mentionnent une restriction du mouvement de l’articulation sous-talienne, empêchant l’articulation de la cheville d’obtenir une position « fermée » et « stable » pour pratiquer la marche dans de bonnes dispositions.
Pour la course, il est nécessaire d’avoir
20° à 30° de « ROM » de dorsiflexion de la cheville pour courir ou sprinter afin d’aider les coureurs à maintenir la position optimale de l’articulation sous-talienne en diminuant son degré de pronation.
En moyenne, les femmes atteignent 24,8° et les hommes 22,8°
Concrètement, quels sont les risques ?
Un « ROM » insuffisant peut conduire à :
Valgus du genou, qui peut conduire à :
Blessures à la cheville (« ankle injury »)
Syndrôme de la bandelette ilio-tibiale (« Iliotibial band syndrome »)
Instabilité rotulienne (« patellar instability »)
Syndrôme fémoro-patellaire (« anterior knee pain »)
Blessure aux LCA (« anterior cruciate ligament injury »)
Augmentation des forces de réaction au sol, qui peuvent conduire à :
Tendinopathie patellaire (« patellar tendinopathy »)
Blessures générales du genou (« knee injury »)
Fracture de stress/fatigue tibiale (« tibial stress fracture »)
Douleurs générales au niveau de l’articulation du genou (« knee joint pain »)
Blessures aux ischio-jambiers (« hamstring strain injury »)
Basculement antérieur du bassin, qui peut conduire à :
Blessures aux ischios-jambiers
Extension réduite du mollet, qui peut conduire à :
Augmentation de la pression sur l’avant-pied, qui peut conduire à :
Hallux valgus
Fasciite plantaire
Métatarsalgies
Tendinopathies d’Achille
Fracture de stress des os du pied
Diminuation du mouvement angulaire du tibia vers l’avant (1/2)
Tendinopathie patellaire
Blessure aux LCA
Hyperextension du genou avec augmentation du stress ligamentaire
Conclusion du bilan dynamique
Le « ROM » de l’articulation de la cheville influence les performances sportives mais aussi le risque de blessure. Ces influences sont d’origines multiples.
La dorsiflexion de la cheville est liée à l’activation de la zone cérébrale responsable de la préparation au mouvement, du cortex d’intégration sensorielle, de la planification / exécution motrice et de la coordination visuo-motrice.
Elle est également liée à une activation accrue des muscles profonds (abdominaux transverses et plancher pelvien) et des quadriceps.
La dorsiflexion est une construction essentielle dans de nombreuses compétences spécifiques comme s’accroupir, sauter, atterrir, patiner sur glace et le balancement des bras.
La diminution du « ROM » de la dorsi-flexion de la cheville contribue au développement de stratégies de mouvements compensatoires qui pourraient être responsables de l’augmentation de risque d’apparition et de récidive de nombreuses blessures.
Les valeurs moyennes du “ROM” répertoriées dans la littérature scientifique sont supérieures à 20° (24,8° pour les femmes, 22,8° pour les hommes).
Par conséquent, il paraît judicieux d’accorder une attention particulière à la cinétique et la cinématique de l’articulation de la cheville en dépistage de pré-saison mais aussi lors d’examens cliniques, lors de la rééducation et ce jusqu’au retour à l’activité.
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Amplitude de la flexion-dorsale de la cheville : relations, risques et traitements Selon le Center National for Disease control and prevention https://www.neuroxtrain.com/article/63852
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